Le Maire est à Riyad, en Arabie saoudite, à la tête de la délégation nîmoise qui assiste à la 45e session du Comité du patrimoine mondial, l’assemblée qui doit se prononcer sur l’inscription de la Maison Carrée de Nîmes à l’Unesco. Interview.
Vivre Nîmes : vous avez lancé les premiers travaux en direction d’une inscription à l’Unesco dès votre arrivée dans le fauteuil de maire Nîmes en 2001. Pourquoi cette volonté ?
Jean-Paul Fournier : Parce qu’il était inconcevable pour moi que la ville de Nîmes, avec son patrimoine extraordinaire, ne figure pas encore sur la liste du Patrimoine mondial de l’humanité. Je regrette d’ailleurs que les démarches en ce sens n’aient pas été effectuées plus tôt : il aurait sûrement été plus simple d’obtenir l’inscription à l’Unesco il y a une trentaine d’années, quand les conditions n’étaient pas les mêmes…
Dès mon élection, j’ai étudié toutes les possibilités pour monter un dossier qui puisse répondre aux critères requis. Nous avons d’abord travaillé pour une candidature commune sur le thème de la Via Domitia, avec la Ville de Narbonne notamment. Cela n’a pas abouti. Nous avons aussi un temps imaginé un dossier en commun avec le Pont du Gard, déjà inscrit, sur le thème de l’aqueduc de Nîmes. Et puis il y eu le beau dossier de « l’Antiquité au présent » présenté en 2018, dans lequel les experts internationaux ont eux-mêmes souligné la valeur universelle exceptionnelle de la Maison Carrée. C’est pour cela que nous portons aujourd’hui, avec l’Etat français, cette candidature de notre temple romain.
Pourquoi cette inscription Unesco est-elle si importante à vos yeux ?
C’est une reconnaissance internationale qui est sans équivalent. La Maison Carrée de Nîmes est dans un état de conservation exceptionnel, grâce notamment aux restaurations que nous avons entreprises de 2006 à 2010 et qui ont permis, après des milliers d’heures de travail des tailleurs de pierre, de révéler toute la splendeur du monument. Elle est aussi le témoignage unique d’un moment important de l’Histoire de Rome, celui de la mise en place d’un culte impérial avec l’avènement d’une période de paix et de prospérité dans tout l’empire : la fameuse Pax Romana. Avec une inscription sur la liste de l’Unesco, c’est cet héritage que nous souhaitons partager avec le monde entier.
Si la Maison Carrée est inscrite à l’Unesco, ce sera aussi grâce à tout le travail de fond mené depuis 20 ans
Jean-Paul Fournier, Maire de Nîmes
Vous vous envolez ce dimanche pour Riyad, à la tête d’une délégation qui défendra la candidature nîmoise devant le Comité du patrimoine mondial. Quel y sera votre rôle ?
L’essentiel du travail, bien sûr, a déjà été réalisé en amont. Nous serons surtout dans l’attente de la décision… Les experts indépendants d’Icomos ont délivré un avis favorable sur notre dossier de candidature, un avis qui est généralement suivi par le Comité : nous allons donc à Riyad confiants et sereins, mais prudents aussi. Comme nous l’avons toujours fait, nous allons continuer, jusqu’au bout, à expliquer le bienfondé de notre démarche et les arguments de la Maison Carrée de Nîmes.
Une réception est par exemple programmée à l’Ambassade de France en Arabie saoudite, à laquelle l’Etat français a convié les 21 ambassadeurs des Etats parties qui siègent au Comité du patrimoine mondial. Nous allons continuer de tout faire pour convaincre, jusqu’à la dernière minute.
Si elle est prononcée, que représenterait pour vous cette inscription de la Maison Carrée à l’Unesco ?
Ce serait une très belle réussite, bien sûr, très importante pour moi et pour les équipes qui ont beaucoup travaillé sur ce dossier. Mais des réussites et des réalisations, il y en a eu beaucoup d’autres depuis 2001… D’ailleurs, si la Maison Carrée est inscrite à l’Unesco, ce sera aussi grâce à tout le travail de fond mené depuis plus de 20 ans pour la Ville et sa transformation. Il y a eu la restauration du monument que j’ai déjà évoqué bien sûr, mais aussi tous les travaux d’aménagement de l’espace urbain, avec récemment encore la piétonnisation de la rue Auguste, la réalisation du musée de la Romanité…
Sur le dossier en lui-même, un travail colossal a aussi été accompli. Et je ne compte plus le nombre de fois où j’ai pris mon bâton de pèlerin pour aller défendre, avec mon Adjointe Mary Bourgade, la cause de Nîmes auprès des différents ministres de la Culture, ni le nombre de réunions de travail au ministère ou à l’ambassade de France auprès de l’Unesco… Voilà 20 ans que nous nous battons pour cela, alors oui, une inscription à l’Unesco serait une récompense et une fierté. Pour moi-même bien sûr, mais aussi pour les élus, pour tous les Nîmois et même pour la France, qui porte le dossier.
A titre personnel, quel est votre rapport avec la Maison Carrée ?
Je la regarde, je l’admire même, tous les matins. J’ai l’impression qu’elle est différente à chaque fois ! Je reste émerveillé par la finesse et la richesse de ses décors : la grande frise ornée de rinceaux, l’élégance de ses colonnes cannelées, les chapiteaux corinthiens… Lors des travaux de rénovation, je suis monté plusieurs fois sur les échafaudages pour les contempler de près. Comment ne pas être ébahi par ce travail ? Avec Carré d’art, qui fête son 30e anniversaire, ce sont 2000 ans d’Histoire qui se font face. Un dialogue face auquel, comme tous les Nîmois je pense, je ne suis pas insensible.
De la même manière que les arènes, la Maison Carrée est le cœur battant de Nîmes. Ce sont nos deux monuments emblématiques, ceux où les Nîmois se retrouvent, où ils font la fête. Ce patrimoine est notre bien le plus précieux, c’est pour cela que le défends avec autant de force : il est à la fois notre passé, notre présent et notre futur.
+ d’infos
Retrouvez le site dédié à la candidature de la Maison Carrée au patrimoine mondial de l’Unesco en cliquant ici.
A lire demain, dans le cadre de notre série spéciale : les travaux de la délégation nîmoise à Riyad.