La Maison Carrée de Nîmes est un temple dynastique impérial consacré aux Césars Caius et Lucius, fils adoptifs d’Auguste, Princes de la Jeunesse.
Il faut ainsi voir dans la Maison Carrée de Nîmes le témoignage d’une convergence entre la volonté du pouvoir et l’attachement des notables locaux au clan d’Agrippa, le père de Caius et Lucius, à qui ce temple était dédié.
Comme le souligne Pierre GROS, professeur émérite de l’Institut universitaire de France : la construction d’un tel temple impliquait une autorisation venant de Rome, concernant autant la construction elle-même que le plan et les ornements de l’édifice. D’ailleurs, les édiles Nîmois demandèrent probablement à Rome ou au gouverneur de la province l’autorisation de bâtir cette construction. Dès lors, il est assez évident qu’Auguste eut la volonté de légitimer son pouvoir, protégé par les dieux à travers la monumentalité de ce temple et le choix des ornements qui le composent.
La Maison Carrée de Nîmes est de ce fait considérée comme un parfait exemple du modèle traditionnel du temple romain à l’époque augustéenne.
Afin de légitimer et d’affirmer peu à peu un nouveau régime politique à Rome, Auguste mena dès 29 avant J.-C. une politique de restauration des cultes civiques avant de mettre en place le culte impérial. Ce dernier constitue un instrument de cohésion dans un empire disparate, témoignage de respect envers le pouvoir et du sentiment du divin qu’il inspire.
Il apparaît d’ailleurs comme l’un des plus anciens temples dynastiques, encore existants, du monde romain : s’il est difficile en l’état actuel des recherches historiques et archéologiques de définir l’antériorité de la Maison Carrée sur les autres temples construits durant le principat d’Auguste, sa dédicace aux fils adoptifs d’Auguste et son emplacement stratégique au centre du forum Nîmois, apparaissent en revanche comme des symboles forts et précoces de l’installation du culte impérial et de la mise en place d’une dynastie régnante à Rome et dans les colonies. À Nîmes, le temple de la Maison Carrée est d’ailleurs à rapprocher avec un ensemble plus vaste, la source de la Fontaine qui constitue le premier lieu d’habitation des Volques Arécomiques, mais aussi un espace sacré dédié à l’empereur romain : l’Augusteum, aujourd’hui disparu.
La Maison Carrée présente un état exceptionnel de conservation, dû à une utilisation continue et des travaux de restauration de grande qualité. Cette caractéristique constitue la condition sine qua non de la lecture et de la compréhension de ce monument. Sa grande intégrité et son authenticité également élevée permettent aujourd’hui, en comparaison notamment de temples contemporains plus ou moins directement dédiés à l’empereur Auguste à Vienne (France), Cordoue (Espagne), Évora (Portugal) ou encore Pula (Croatie), d’y voir un exemple abouti du temple de l’Antiquité romaine mais aussi l’un des édifices les plus remarquables de la période romaine.
Ce temple est aussi la preuve ou la marque tangible d’un moment aussi succinct qu’éminent dans l’histoire de la Rome antique, celui du principat d’Auguste, point de bascule entre la République et l’Empire.
Il est, pour l’historien de l’architecture Pierre Gros, « un document unique en son genre » en cela qu’il atteste, plus précisément encore, de la formation du culte impérial dans les colonies de l’Empire. Selon le même spécialiste de l’architecture romaine, elle constitue même « une des pièces maîtresses du dispositif du culte impérial » dans les provinces de Rome.
La Maison Carrée constitue la traduction matérielle du basculement historique entre République et Empire sous le Principat d’Auguste. Comme l’a montré l’historien Gilles Sauron, elle fait pour cela la synthèse architecturale et stylistique de monuments augustéens de Rome comme le temple d’Apollon In Circo (aujourd’hui disparu), celui de Mars Ultor ou encore l’Autel de la Paix, l’Ara Pacis (première imitation provinciale de sa frise d’acanthes et donc aussi de sa symbolique forte orientée vers le maintien de l’ordre et de la paix, ou Pax Romana).